Chemsex: sortir des représentations sensationnalistes et stigmatisantes
La vision réductrice, catastrophiste et culpabilisatrice donnée par les médias généralistes ne doit pas faire oublier les réalités des chemsexeurs et de celleux qui les accompagnent.
«Les chemsexeurs ne sont ni fous, ni suicidaires ou inconscients.» Cette phrase simple écrite dans une brochure de l’association française AIDES semble une évidence. Et pourtant, poussée par l’actualité, la presse mainstream n’a eu de cesse au cours des derniers mois de dépeindre le chemsex sous un angle aussi stigmatisant qu’alarmiste, avec parfois cette fascination malsaine qui animent certain·e·s cisthets dès lors qu’il s’agit de parler de sexualité gaie.
Loin de ces représentations malheureuses et sensationnalistes, il y a la réalité des chemsexeurs et de celleux qui œuvrent à accompagner ceux qui en éprouvent le besoin. Invitant à trouver le ton juste, Clara Feteanu, psychiatre psychothérapeute à Checkpoint Vaud expose: «La manière dont on parle du chemsex a un impact direct pour les personnes concernées et peut entraver ou retarder la demande d’aide ou le recours au soin. Il ne faut ni enjoliver ou banaliser, ni stigmatiser. En outre, il ne faut pas résumer la sexualité gaie au chemsex.» La thérapeute appelle ainsi à regarder les chiffres concernant la prévalence «On estime que 20% des hommes gais ont déjà pratiqué le chemsex – et c’est ce que nous retrouvons globalement dans nos consultations. C’est donc un phénomène qui concerne une minorité. En outre, au sein même de ce phénomène se côtoient différentes manières de pratiquer, en couple ou avec des partenaires multiples, chez soi ou durant des soirées, de manière spontanée ou plus organisée…»
Il existe des chemsexeurs heureux
Et dans cette pluralité de cas, il y a aussi différents types de relations entretenues avec le chemsex. Parmi les chemsexeurs, il ne faut pas oublier ceux qui vont bien et pour qui la pratique est avant tout une source de plaisir. «Le chemsex peut parfois être une expérience positive dans le sens où il peut apporter du plaisir, qu’il participe à l’expression de soi, à l’expérimentation sexuelle, à la découverte d’autres pratiques, à des rencontres ou à l’intégration au sein du groupe», reconnaît Clara Feteanu. Pour Florent Jouinot, responsable de la coordination romande pour l’Aide suisse contre le sida, «ces “chemsexeurs heureux” sont une majorité. Et, puisqu’ils n’ont pas de soucis et pas besoin d’aide, on ne les voit pas dans les centres de santé communautaire.»